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Karmenu Vella : L'UE restera pleinement attachée à la mise en œuvre de tous les objectifs de la politique commune de la pêche, même après le Brexit

Entretien avec le commissaire européen à l'environnement, aux affaires maritimes et à la pêche

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A l’occasion des Assises de l’économie de la mer qui se sont tenues à Brest les 27 et 28 novembre derniers, Karmenu Vella, commissaire européen à l’environnement, aux affaires maritimes et à la pêche s’est exprimé sur la Croissance bleue, qu’il a qualifiée de « moteur pour l’Europe ». Il a rappelé la position de la France au 4èmerang européen de cette économie bleue, selon une étude récente de l’OCDE et s’est félicité des orientations stratégiques françaises. Il s’est aussi félicité des bons résultats de la pêche française dont la valeur ajoutée a augmenté de l’ordre de 30% au cours des 8 dernières années. Il a salué le travail des pêcheurs français, « soucieux de la durabilité des stocks & actifs dans l'amélioration de leur gestion. » Il a indiqué par exemple que « Grâce à ces efforts, la sole sera pêchée de manière durable dans le golfe de Gascogne & l'est de la Manche. Ce dur labeur porte ses fruits, a-t-il conclu. » La pêche reste une priorité pour la Commission européenne. Dans le contexte du Brexit, elle devra faire partie d’un nouvel accord d’ici 2020. Quel en sera l’impact sur la politique commune de la pêche ? Sea to sea a posé quelques questions au Commissaire Vella : 

Sea to sea : Le Brexit ne risque-t-il pas de remettre en cause les objectifs généraux de la PCP et la durabilité de la pêche ( RMD, OD…)? Quels engagements la Commission peut-elle obtenir du Royaume-Uni ?

Karmenu Vella : Dans le cadre du futur partenariat économique avec le Royaume-Uni, nous établirons un nouvel accord de pêche concernant, entre autres, l'accès aux eaux et la répartition de quotas. Le projet d’accord politique approuvé par le Conseil européen (A50) le 25 novembre énonce des objectifs fermes en matière de coopération future en matière de préservation des ressources, ce qui est essentiel compte tenu de l’ampleur du stock partagé à gérer conjointement.
 

Dans les négociations sur ce futur accord de pêche avec le Royaume-Uni, qui sera un partenaire stratégique important de l'UE dans le secteur de la pêche, la Commission sera guidée par les mêmes objectifs et principes de la politique commune de la pêche que lors de ses négociations avec d'autres pays tiers. Au cours de ces négociations, elle visera à faire en sorte que le Royaume-Uni respecte également la nécessité de durabilité et de protection des stocks et que, dans le cadre du futur accord de pêche conclu avec le Royaume-Uni, nos propres mécanismes de conservation soient assortis de mesures similaires pour préserver les stocks de pêche.

L'UE restera pleinement attachée à la mise en œuvre de tous les objectifs de la politique commune de la pêche, même après le départ du Royaume-Uni. Ceci inclut les objectifs de RMD et l'obligation de débarquement. Le départ du Royaume-Uni ne modifiera en aucun cas ces objectifs.

STS : Concernant l’Obligation de Débarquement qui doit être généralisée en 2019 : comment la Commission voit-elle sa mise en œuvre ? Des mesures d’accompagnement sont elles possibles pour les pêcheries multi-spécifiques ? 

K.V. : La réforme de la politique commune de la pêche (PCP) de 2013 visait à éliminer progressivement cette pratique inutile du rejet, grâce à l'introduction de l'obligation de débarquement. L'obligation de débarquement entrera pleinement en vigueur en 2019.

Conformément à cette obligation, les pêcheurs doivent ramener à terre toutes les captures d'espèces soumises à des totaux admissibles de capture (TAC) ou à des tailles minimales de capture (en Méditerranée). Cela mettra fin à la pratique non durable consistant à rejeter à la mer des poissons indésirables. L'utilisation du poisson débarqué doit être limitée à des fins autres que la consommation humaine directe, notamment la farine de poisson, l'huile de poisson, la nourriture pour animaux domestiques, les additifs alimentaires, les produits pharmaceutiques et les cosmétiques.

Nous travaillons avec les États membres et le secteur pour aider à relever les défis et à surmonter les difficultés éventuelles. Il existe plusieurs éléments de flexibilité et un ensemble de mesures possibles pour faciliter la mise en œuvre complète. Celles-ci incluent une utilisation plus flexible des quotas, une exemption de l'obligation de débarquer les poissons qui survivent après leur retour à la mer et une allocation exceptionnelle pour rejeter une quantité limitée de captures indésirables inévitables. Le FEAMP couvre les investissements dans les engins de pêche sélectifs, dans l'amélioration des infrastructures portuaires et dans la commercialisation des captures indésirées.

STS : Quid de la réforme des mesures techniques?

K.V. : La proposition relative à de nouvelles mesures techniques constitue une autre étape importante pour réduire les captures indésirées et éliminer les rejets, notamment par une meilleure sélectivité et une meilleure protection des poissons juvéniles et des frayères. La proposition énonce les règles relatives aux types d'engins de pêche que les pêcheurs peuvent utiliser, quand et où ils peuvent pêcher, et comprend des mesures visant à renforcer la protection des écosystèmes et des habitats marins. Grâce à une approche plus régionalisée, le règlement révisé donnera aux États membres, aux pêcheurs et aux autres parties prenantes la possibilité de décider des mesures à appliquer dans leurs régions pour instaurer une pêche durable, à condition qu’elles soient au moins aussi efficaces que les mesures actuelles.

La révision de ce règlement est en cours de discussion par les colégislateurs. Entre-temps, nous veillerons à ce que la mise en œuvre des règles en vigueur sur les mesures techniques reste une priorité, car ce sont des éléments fondamentaux pour atteindre notre objectif de pêche durable.

STS : Quid de la mise en œuvre des plans de gestion pluriannuels ?

K.V. : Depuis l'adoption de la réforme de la PCP, la Commission a proposé cinq plans pluriannuels (PPG) pour une pêche durable. Le plan de la mer Baltique a été adopté en 2016 et le plan de la mer du Nord en 2018 : les deux plans sont déjà en vigueur.

Trois autres PPG ont été proposés par la Commission et sont actuellement sur la table des co-législateurs: le plan Adriatique pour les petits pélagiques (déposé en février 2017) et les plans pour la Méditerranée occidentale et pour les eaux occidentales (tous deux déposés en mars 2018). ).

Discours de Karmenu Vella lors des AEM 2018


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